Soudain, l’été 1959…

Si Soudain l’été dernier, le film de Joseph L. Mankiewicz tourné à l’été 1959, est bien basé sur la pièce de Tennessee Williams, son scénario a été élaboré par l’écrivain, scénariste et essayiste Gore Vidal, pour le producteur Sam Spiegel (Columbia Pictures).
Tennessee Williams est crédité au générique mais il a toujours dit n’avoir rien à faire avec ce film !

Le choix d’Elizabeth Taylor pour jouer Catherine déplaisait fortement à Tennessee Williams, qui le considérait comme un contresens complet. C’est par ailleurs Elizabeth Taylor qui obtint pour son ami Montgomery Clift (qui avait alors de graves problèmes de santé) le rôle du Dr Cukrowicz, ce jeune médecin qui essaye de comprendre pourquoi une riche propriétaire de Louisiane, Violet Venable (interprétée par Katharine Hepburn), veut faire passer sa nièce Catherine pour folle et ne pouvant être soignée que par une lobotomie…
Katharine Hepburn refusa toujours de voir le film, considérant qu’il s’agissait du projet le moins glorieux de sa carrière, au point de se brouiller définitivement avec le cinéaste.
La patte de Mankiewicz se reconnaît pourtant très rapidement, en particulier par une narration qui multiplie les très nombreux flashbacks, scènes durant lesquelles le cinéaste réussit à ne jamais montrer Sebastian Venable, le fils de Violet et cousin de Catherine, qui a disparu l’été dernier dans d’étranges circonstances, alors qu’il était en voyage dans un pays étranger avec sa cousine.

Pour Tennessee Williams, le film était si loin de sa pièce que « cela lui donnait envie de vomir » (interview pour The Village Voice, 1973). « J’ai  été si choqué par cette approche littérale, parce que la pièce était métaphorique. Pour moi, c’était une sorte de poème. »
Le scénariste Gore Vidal reprochait lui à Mankiewicz d’avoir changé la fin pour un plus complet happy end. Le réalisateur lui-même reprochait à la pièce originale d’être « mal construite […], basée sur une psychologie freudienne des plus primaire »1.

Selon le Code de Production Cinématographique américain, aucune allusion à l’homosexualité ne pouvait être faite à l’écran. Tout resta donc dans l’allusion la plus prudente, mais le film choqua néanmoins une bonne part du public.
Mais la bande-annonce n’invitait-elle pas le public à l’être, a priori ?

Le film trouva finalement son public et récolta trois nominations aux Oscar…
S’il n’est ni le plus connu ni le plus beau des films de Joseph L. Mankiewicz, Soudain l’été dernier est désormais considéré comme un classique du cinéma d’après-guerre, et lorsqu’on mentionne ce titre aujourd’hui, on pense certainement plus au film qu’à la pièce de Tennessee Williams.

1– Hadleigh, B. (2001). The Lavender Screen: The Gay and Lesbian Films – Their Stars, Makers, Characters, and Critics (Rev. ed.). New York City, NY: Citadel Press.

Soudain l'été dernier
de Tennessee Williams
mise en scène et scénographie Stéphane Braunschweig

du 10 mars 14 avril / Odéon 6e
création