Descartes : « choisissez-vous la pilule rouge ou bien la pilule bleue ? »

Sommes-nous condamnés à être prisonnier de l’illusion , sans même le savoir, à l’instar du personnage de Néo interprété par Keanu Reeves ?
Sorti en 1999, Matrix, le premier film de la trilogie des frères Wachowski est sans doute le plus métaphysique de la trilogie. Les liens entre la pensée de René Descartes et le combat mené par Néo sont bien plus étroits qu’on pourrait le croire…

L’intrigue principale de cette trilogie de science-fiction se dissimule derrière l’apparat attirant de l’image hollywoodienne : lunettes noires et blousons en cuir, gros calibres et cascades en tout genre, répliques aiguisées et dialogues enlevés. Avant d’évoquer les fusillades et les courses poursuites, le film de 1999 fait écho à la philosophie de Descartes à travers le thème fondateur de la perception du réel. Car au delà de l’affrontement entre Néo et les machines rutilantes, ce sont bien deux mondes qui s’entrechoquent. Le monde intelligible dit monde réel, face au monde sensible dit monde de l’illusion. Deux mondes et une inconnue : quelle est la véritable place de l’homme et dans quel monde est-il sensé la trouver ?

L’illusion du réel est récurrente dans Matrix et cette dernière soulève la question de la vérité. Que tenons-nous pour vrai ? Existe-t-il une vérité ou une infinité de vérités ? Ce que nous pensons comme étant le plus certain est-il pour autant vrai ?
Le réel selon le philosophe est une quête vers la réalité, un combat permanent mais non une conquête définitive car la Matrice est belle et bien indestructible. Il faudra tout de même trois films pour que Néo comprenne que détruire l’illusion est une mission impossible qui s’apparente à un duel sans fin.

« Est humain celui qui doute » écrivait Descartes.
Nul besoin de cours accélérés de kung-fu et d’un arsenal de guerre pour combattre le monde de l’illusion. Descartes a vu dans le doute l’arme redoutable pour se défaire de l’emprise de l’hallucination d’un monde illusoire.
Le doute est l’acte fondateur de la philosophie cartésienne : afin de connaître la connaissance indubitable, il faut se défaire de ses connaissances antérieures et porter son doute sur tout ce qui nous entoure au risque de bouleverser totalement les fondements de sa propre vie.
Même Néo, qui est, rappelons le, « l’élu du monde des hommes », subit un choc lorsqu’il découvre que sa vie moribonde d’employé de bureau n’était qu’une illusion et que la réalité est incarnée par les paroles d’une équipe de portes flingues peu loquaces venus le tirer de son confort monotone.

Alors que choisir : foncer vers l’inconnu ou bien se complaire dans l’illusion ?
En d’autres termes, choisissez-vous la pilule rouge ou bien la pilule bleue ?

Charles Delouche
janvier 2016

La vie comme un songe
Descartes ou : pouvons-nous sortir de la Matrix ?
Raphaël Enthoven
23 janvier / 14h30
Odéon 6e / Grande Salle