Sylvain Creuzevault : sa première fois à l’Odéon

Berthier'06

Berthier’06, affiche

C’était en 2006. Juin 2006.
Depuis quelques années déjà, quelques élèves du Conservatoire s’étaient réunis pour former une troupe, le D’Ores et Déjà : Damien Mongin, Vladislav Galard, Louis Garrel, Amandine Pudlo… et bien entendu Sylvain Creuzevault.
En juin 2006 l’Odéon-Théâtre de l’Europe présentait aux Ateliers Berthier son 2e festival de jeunes compagnies, organisé avec le Jeune Théâtre National : Berthier’o6. Invitation à découvrir la jeune création théâtrale, « pour les curieux et les amateurs de découverte ».
D’Ores et Déjà était de la fête, et jouait Fœtus, création collective (la cinquième de la troupe) autour de cinq figures qui entraient en « collisions » pour bâtir librement un autre monde :

Ce qui est certain :
Les futures mères sont priées de mettre au monde dans les délais légaux.
La tentation d’abattre le Président est bonne pour le moral.
On peut coucher dès le premier soir et avoir dit oui au référendum.
N’est pas clown intermittent qui veut.
Y’en a que ça intéresse l’étude de l’évolution de la fonte de la calotte glaciaire, au Pôle Nord.

Chacun sa vie, non ?

Baal, couverture du programme

Baal, couverture du programme

Dans les cartons de D’Ores et Déjà, il y avait aussi Baal, la première pièce de « Bert Brecht », comme se faisait appeler en 1919 le dramaturge âgé de 20 ans.
Dès le mois d’octobre de cette même année 2006, l’Odéon et le Festival d’Automne font le pari de la présenter au public des Ateliers Berthier, pour une vingtaine de représentations. Sylvain Creuzevault, qui signe la mise en scène, et ses amis – Damien Mongin, Arthur Igual, Louis Garrel – aiment la rencontre frontale avec chaque public singulier, le théâtre comme lieu d’intensités. Ils présentent, dans une traduction nouvelle d’Eloi Recoing, un Baal digne de celui dont Brecht disait : « il date de l’époque qui montera cette pièce».

Sylvain Creuzevault se posait alors des questions sur la pièce de Brecht qui ne sont pas sans rappeler sa manière d’aborder aujourd’hui les Démons de Dostoïevski :

La pièce elle-même, j’ai la sensation qu’elle est comme un coup de dés. Elle a en elle quelque chose d’inaugural et de hasardeux. Brecht la lance et prend un risque. Et nous, nous sommes dans une situation en quelque sorte aussi inaugurale que Brecht au moment où il l’écrivait. Nous aussi, nous sommes sur un seuil. Ce sera d’ailleurs la première fois que la compagnie sera réunie au grand complet. Cela dit, je ne sais pas encore si ce coup de dés doit être abordé comme une partition ou plutôt comme un matériau d’exploration, d’explosion. […] Son potentiel ne peut devenir effectif qu’en cours de travail – sa puissance explosive n’est pas une idée préliminaire, elle doit résulter de notre façon de l’aborder. […] Je préfère travailler à partir des sensations, des émotions en vrac des comédiens, plutôt que d’une lecture avant tout centrée sur le texte. Il ne s’agit pas de le décortiquer, mais de retrouver l’énergie qui l’a fait naître. Après… les difficultés commencent.
Lettre de l’Odéon n°61. Propos recueillis le 19 juin 2006

 

 

Les Démons
d’après Fédor Dostoïevski
mise en scène Sylvain Creuzevault

21 septembre - 21 octobre / Berthier 17e