Maria de Medeiros, sa première fois à l’Odéon

En cette année 1992 qui célèbre l’Espagne sur la scène de l’Odéon-Théâtre de l’Europe (500 après la découverte de l’Amérique), l’acteur et metteur en scène espagnol José Luis Gómez met en scène La Vie est un songe de Calderon de la Barca, une pièce du Siècle d’or, écrite en 1635 comme l’Illusion comique de Corneille, et quelques mois avant Le Cid.

Au cœur de la pièce, il y a la question : qui suis-je ?
Sigismond (Thierry Hancisse), enfermé dès sa naissance dans une tour pour conjurer le sort prédit par les astres, ne sait pas être le prince héritier de Pologne. Il va pourtant être roi pour un jour, et va se comporter en tyran, en homme sauvage, comme annoncé. Ramené en prison, on le persuade qu’il a rêvé. Lorsqu’une sédition vient le délivrer pour lui rendre son trône, ce fou se conduit en sage… Le songe se dissipe ou se confond avec la réalité quand le prince entre dans l’humanité, touché par une énigmatique grâce. « Rêvons encore » dit-il avant de remettre à son père une dérisoire couronne de fer-blanc, laissant le public dans le merveilleux engourdissement d’un rêve dissipé. « L’homme qui vit rêve ce qu’il est, jusqu’à ce qu’il s’éveille… », et choisisse de maîtriser son destin, donc ses pulsions.

Dans le rôle de l’amoureuse Rosaure, la jeune Maria de Medeiros, 26 ans. Travestie en petit page androgyne, elle est à la fois fragile et puissante lorsque, déshonorée par le parjure Astolphe, cousin de Sigismond, elle le poursuit l’épée à la main, crie vengeance, puis se métamorphose en une créature séraphique sous ses bandeaux sombres. « Dans le si beau rôle de Rosaure, Maria de Medeiros nous donne l’éblouissante et discrète démonstration de ses talents divers », écrit Armelle Héliot dans le Quotidien de Paris. « Elle donne l’impression de descendre d’un rayon de lune, posée sur terre par hasard. Elle joue de la délicatesse comme d’autres de leur bonne mine vitaminée. Raffinement et sensibilité fertilisent une personnalité qui n’aurait pas déplu à Virginia Woolf », écrit encore Marion Thébaud dans Le Figaro.

L’abstraction d’un texte ne me gêne pas, dit Maria de Medeiros à propos de la pièce. J’en comprends souvent le sens profond sans pouvoir l’expliquer, c’est comme une évidence, une reconnaissance. Dans mes choix je pars toujours de mots. Le théâtre est un jeu de désirs, il traverse la mémoire. Le texte c’est notre chair. […] Le théâtre est un miracle sur soi-même : on y est spectateur de son propre inconscient.

Retrouvez Maria de Medeiros à l'Odéon-Théâtre de l'Europe dans
Un amour impossible
d'après le roman de Christine Angot adapté par l'auteur
mise en scène Célie Pauthe

25 février 26 mars / Berthier 17e