Sur le chemin de Notre-Dame, par un après-midi pluvieux

En traversant le square Paul Painlevé,
nous vîmes la louve cachée dans un buisson
et Léon* nous conta
cette fable que Queneau composa
au fond d’une forêt profonde
en trempant ses pieds dans l’onde
d’un ru pur
comme lui nous fûmes trempés.

Parvenus à mi chemin, seul Léon sait à mi-chemin de quoi.
Prenant le temps d’arrêter le temps mais pas la pluie il nous offrit Parlerie de la vie un merveilleux poème du poète brésilien Carlos Drummond de Andrade, dont voici quelques vers
« Comme pleure la vie
de savoir qu’elle est vie
et que jamais jamais
ne la prend au sérieux
l’homme, ce loup-garou. »

Destination en vue mais Léon le facétieux snoba l’air de rien la grande Dame.
« Enfin, marchons, nos pieds finiront bien par nous mener quelque part. Tout droit. Oui, tout droit. Le plus court chemin d’un point à un autre restant la ligne droite, dans le doute, on va tout droit. »

Averse averse averse averse averse averse
ô pluie ô pluie ô pluie ô pluie ô pluie ô pluie!
gouttes d’eau gouttes d’eau gouttes d’eau gouttes d’eau
parapluie ô parapluie ô
paraverse ô!
Avec Queneau (et non pas « que d’eau! ») nous traversâmes le Square René Viviani où nous faillîmes perdre notre guide. Face à lui trône l’arbre connu pour être le plus vieux (pluvieux) de Paris, ce robinier ou faux-acacia planté en 1601 par Jean Robin arboriste du roi Henri IV.

Enfin à l’abri, partis pour grimper les 422 marches qui mènent au sommet de la Tour Sud.

« Oui, ce monde est bien plat », en êtes-vous si certain cher Jules Laforgue ?


Sont-ce les Djinns d’Hugo qui vinrent se poser là après leur course folle ?
« Cris de l’enfer ! voix qui hurle et qui pleure !
L’horrible essaim, poussé par l’aquilon,
Sans doute, ô ciel ! s’abat sur ma demeure.
Le mur fléchit sous le noir bataillon. »

Sous le bourdon Emmanuel, 14 tonnes de bronze, Thaïs** à la voix qui chante nous fit le cadeau d’Ultima verba, composé à Jersey par Hugo l’exilé, le 2 décembre 1852. Pour finir.
« Si l’on n’est plus que mille, eh bien, j’en suis ! Si même
Ils ne sont plus que cent, je brave encor Sylla ;
S’il en demeure dix, je serai le dixième ;
Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là ! »

Marylène Bouland

* Léon Bonnaffé, auteur du texte qui a accompagné les trois promenades littéraires de la saison des Bibliothèques de l’Odéon
** Thaïs Lamothe, comédienne, lectrice des textes dans les monuments