Bien qu’il connaisse Paris depuis longtemps (il y a étudié l’histoire du théâtre à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes à la fin des années 80, avant d’être assistant de Peter Brook aux Bouffes du Nord sur Impressions de Pelléas en 1992), l’Odéon-Théâtre de l’Europe a accueilli Krzysztof Warlikowski en décembre 2007 seulement, à l’occasion de la venue de Krum, de Hanokh Levin (publié en français sous le titre de Kroum l’ectoplasme), un spectacle en polonais créé au Festival d’Avignon 2005.
À 45 ans, Krzysztof Warlikowski avait déjà créé sur toutes les grandes scènes européennes, au Holland Festival, au Festival Europalia, au Festival Theater der Welt… et dans de nombreuses langues. Au Festival d’Avignon il avait présenté deux autres spectacles  : Hamlet de Shakespeare en 2001 et Purifiés de Sarah Kane en 2002. Son Dibbouk avait tourné en France à partir de 2003 (aux Bouffes du Nord d’abord), et Krum était passé par Bordeaux, Amiens, Valence, scènes coproductrices du spectacle.

Krum, c’est l’histoire d’un homme qui revient à Tel-Aviv avec du linge sale dans une valise à roulettes, et qui voit que ça ne sert à rien, ni d’être revenu ni d’être parti, ni de vivre ni de ne pas vivre.

Qu’est-ce qu’une vie réussie ? se demandent Levin et Warlikowski. Le metteur en scène, dans l’univers glauque, aux lumières d’aquarium, de halls de cinéma ou d’appartements poisseux, élimine d’emblée la réussite sociale […]. Il y oppose, avec une compassion retenue à l’extrême, l’expérience de la douleur, de la souffrance, dans ce qu’elle a de plus commun. […] La vraie vie est ailleurs, dit à un moment Krum. Oui, mais où ? Levin, Warlikowski et ses extraordinaires comédiens, qui portent l’art de l’acteur à des sommets, n’apportent pas de réponse. Ou, s’ils l’apportent, c’est dans leur théâtre, qui demande à la tristesse des choses, comme aurait pu le faire Fassbinder, son seul enseignement.
Fabienne Darge, Le Monde, 12 décembre 2007